Parapente, compétition, cross, fun .... par Thibaut Lavolé
1 Juin 2015
Samedi matin, c'est étonnement calme sur le déco Ouest de St Omer. Nombre de crosseux ont fait le déplacement, la pression des grosses journées est présente, mais personne ne se décide à décoller. Les débutants enchaînent les ploufs, ce n'est pas rassurant.
Guido se met en l'air, très vite rejoint par d'autres, pendant que je finis mon sandwich et que j'entame ma pré-vol. C'est décidé, aujourd'hui je prends mon temps... Premier jour de vacances, finie la pression des études. J'ai accumulé beaucoup de frustration ces derniers temps et je ne compte pas en rajouter aujourd'hui. Je prendrais le temps qu'il faut, mais je ferai les kilomètres qu'il y a à faire.
De toutes façons, je ne suis pas préparé pour un grand vol. Mon GPS est en révision, le secondaire a à peine de la batterie, j'ai pas de penilex, et je n'ai que quelques heures sous cette IP8! Ce sera donc un cross de prise en main, tranquille :)
Une partie des guns est déjà en train d'enrouler quand je sens l'excitation monter et me pousser à décoller. La première surprise du vol arrive alors, par les airs... Adrien a décollé une heure plus tôt des Roches de Ham et vient finir son glide dans le haut de la grappe qui s'extrait. Un joli coup, il a déjà 40 bornes d'avance! Je me concentre et arrive à rejoindre le haut de la grappe, entouré de bons plaineux, ça sent la bonne journée.
Bonne ambiance dans le thermique, le sourire est sur tous les visages. Bien que la première montée au nuage soit assez longue, nous finissons tout de même par atteindre les barbulles, mais très rapidement la grappe s'éclate.
Un petit groupe composé d'Honorin et Chouchou en tête, Léo et moi à la poursuite, suivis de Nico, Adrien et quelques autres se jette dans la plaine, bien décidé à exploiter cette journée qui s'annonce pas si mauvaise que ça finalement.
Mais nous déchantons assez vite, il n'aura pas fallu plus d'une transition pour que nous soyons déjà au point mort, en mode survie... Encore assez haut, mais plus de marge, et cela ne monte plus beaucoup. En me traînant tant bien que mal jusqu'à Falaise, je trouve le thermique salvateur, celui qui redonne le moral. Les chevaux sont lâchés, je commence à me détendre en additionnant les plafs, je peux même sortir l'accélérateur... jusqu'à Vimoutiers. On perd alors Hono, tanqué dans la cuvette.Léo et moi nous retrouvons seuls, un peu en mode touristes. Pas besoin d'échange radio pour se mettre d'accord, personne ne bougera tant que ça ne monte pas plus... Les thermiques sont faibles, la dérive quasi nulle, ça n'avance plus et il faut s'armer de patience. Adrien change de cap et part au Sud, tandis que Nico qui a tracé une fléchette au-dessus de Vimoutiers semble bien bas de l'autre côté. Le concours de patience est lancé....
Je ne suis pas pressé et donc plutôt bon à ce jeu, d'autant qu'il faudra bientôt prendre la décision de craber au Nord ou au Sud. Finalement, je ne suis pas arrivé au plaf quand je me décide à partir, Le ciel semble s'être rallumé, les cums grossissent. Nico annonce à la radio qu'il pose, km 70, tandis que Léo et moi nous décidons pour le couloir de Bernay. Il n'est pas large, mais si l'on passe derrière c'est gagné. De longues minutes de surveillance du GPS commencent. Il faut avancer dans ce couloir sans s'approcher trop des TMA. Coup du chance, le thermique que l'on attrape à l'entrée dérive à quelques degrés près dans l'axe du couloir, et nous avançons maintenant un peu plus rapidement. À peine sortis de ce couloir, il faut à nouveau craber pour éviter la CTR de Rouen. Nous ne sommes pas dans la dérive, mais nous avançons relativement bien. Chaque thermique nous rapproche de la TMA d'Evreux, chaque transition est optimisée pour nous en éloigner tout en conservant une vitesse de vol convenable. 55km plus loin, s'en est fini de la gestion des espaces aériens, la pointe de Rouen est passée, nous pouvons enfin nous relâcher, sortis du point dur de ce vol.
Maintenant, il n'y a plus qu'à profiter. Nous approchons du km 150, et sommes totalement en mode tourisme. Les échanges radio se limitent à "Putain, c'est trop beau les méandres de la Seine" et autres "Les lacs turquoise et les carrières, ça fait vraiment un beau mélange". Nous passons tranquillement au-dessus de la Seine. La zone est porteuse mais aucun thermique ne veut passer sur notre chemin. J'en profite pour constater que je suis vraiment bien sous mon Icepeak, elle communique ce qu'il faut, pas de parasites tout en restant solide, même accélérée.
Nous trouvons finalement un petit thermique en retraversant la Seine, et Léo commence à attaquer. Je suis plus sur la défensive et j'attends d'être au plaf pour avancer. La journée est loin d'être terminée, mais les thermiques faiblissent; coup de mou habituel en plaine. Dieppe se profile à l'horizon quand Léo commence à se battre dans les basses couches, je le soutiens à la radio, mais cela ne suffira pas, il pose au km 155, alors que je trouve le thermique juste derrière son point de posé.
J'ai du mal à prendre la décision de l'abandonner, nous venons de faire 100km en nous aidant mutuellement... J'aime vraiment ces vols à deux, où chacun joue son rôle, tantôt à l'attaque, tantôt en défense, c'est vraiment un bon soutien mental de voler entre potes. Et puis l'appel de la mer devient trop fort. Il ne me reste que 2 ou 3 thermiques pour être à Dieppe. Et pire encore, le ciel est fumant dans la dérive! Commence alors une longue remontée jusqu'au nuage, puis je me laisse glisser jusqu'au thermique d'après, ça flotte bien, c'est agréable.
Je réagis alors que j'entends encore la balise de St Omer à la radio, et je parviens même à joindre Jean-Paul qui y est en vol. Je tente une négociation de récup pour Dieppe, sans trop d'espoir. Puis rapidement je perds le contact, j'ai perdu de l'altitude. La rencontre du vent météo et de la brise de mer rend la masse d'air assez peu homogène, et je dois me reconcentrer sur cette fin de vol. Heureusement, cette IP8 est solide et bien que se tordant dans tous les sens, elle me montre le chemin du nuage.
Un thermique plus tard, je suis en train de me laisser glisser vers Dieppe. Ma vitesse sol est en chute libre, je n'avance plus... La brise de mer me contre et m'empêche d'aller survoler Dieppe.
Je pose sur l'aérodrome à l'entrée de la ville, le sourire aux lèvres.
La chance me sourit encore une fois, et les paras de l'aérodrome me déposent à la gare de Dieppe 5 minutes avant le départ du dernier train pour Rouen. Juste le temps d'acheter mon billet et me voilà en route pour rejoindre Léo qui a réussi à aller jusqu'à Rouen en stop. Les coups de téléphone et les sms commencent à arriver. J'apprends que Phiphi et Serge sont posés à côté de Rouen et que Nadine vient les chercher. Je n'ai pas à négocier beaucoup pour qu'ils nous récupèrent à la gare. Une petite halte dans une pizzéria, et nous voilà rapidement rentrés à nos voitures, à 1h du mat.
Le vent est encore présent et bien axé, la lune est haute dans le ciel et la nuit claire, certains en profitent... ;-)
Pour ma part, je rentre chez moi, content, avec un nouveau record perso en poche, une trace en slalom sur fond d'espaces aériens plutôt chouette, et des images plein les yeux de ce beau vol!!
Il restait encore facilement une heure de vol dans ce ciel de folie, si ce n'est plus, j'aurais pu choisir le couloir Ouest plutôt que Dieppe, mais cela facilitait la récup, et cela fait toujours plaisir de finir son vol à la mer. Comme celui d'hier, les Roches de Ham /Port en Bessin, mais ça, c'est une autre histoire ;-)
Le défi est lancé, et en partant des Roches de Ham, le potentiel est plutôt grand. St Omer/St Omer, c'est 300km, et c'est noté dans un coin de ma tête.